Spécialisé dans l’interopérabilité, Telecom Exos déploie un nouveau connecteur dans son Logiciel de Régulation Médicale pour les SAMU.
Sur un projet original du SAMU57 de Metz et de l’association Française des Premiers Répondants (AFPR), Exos a développé un nouveau connecteur permettant de déclencher des secouristes lors d’un arrêt cardiaque et de superviser la mission, directement dans eRM, le logiciel de régulation médicale.
Aude Jesupret, Assistante de Régulation Médicale (ARM) au SAMU de Metz et référente du projet ainsi que Frédéric Leybold, Président de l’association AFPR, infirmier hospitalier et pompier témoignent de cette innovation en place depuis l’automne.
Exos présentera ses solutions au prochain Salon Secours Expo qui se déroule du 9 au 12 mars, Porte de Versailles. Retrouvez-nous sur le stand C9/D10.
Exos : Qu’est-ce que l’AFPR ?
Frédéric LEYBOLD : « L’idée m’est venue lorsqu’une de mes voisine a fait un arrêt cardiaque et que j’ai découvert la situation quand l’ambulance est arrivée chez elle alors que j’aurais pu faire gagner quelques minutes à la personne.
Du coup, le constat de départ est qu’il existe des personnes formées à l’intervention sur arrêts cardiaques mais que ces interventions, à la différence d’accidents de la route ou autres, sont « silencieux » ou « invisibles » pour ces citoyens qui ont des compétences pour aider.
L’application, c’est le passage obligé mais l’AFPR, c’est surtout créer un système de réseaux ancrés dans les territoires entre des citoyens, des bénévoles, des élus pour augmenter la communauté au service des victimes d’arrêts cardiaques.
Inévitablement, la vision de l’AFPR est donc plus « lourde » que d’autres solutions puisque pour devenir 1er répondant, il est nécessaire d’être formé. Plutôt que le SDIS ou le SAMU guide une personne novice, nous faisons le pari qu’une personne formée sera plus efficace dans un contexte d’intervention parfois compliqué.
Aujourd’hui, l’AFPR c’est 3000 citoyens formés aux gestes de secours en cas d’arrêt cardiaque sur les territoires de Moselle et de la Marne. Notre objectif est de créer un lien « familial » avec cette communauté où notre rôle est de répondre à leurs questions, les aider… »
Créer un système de réseaux ancrés dans les territoires entre des citoyens, des bénévoles, des élus pour augmenter la communauté au service des victimes d’arrêts cardiaques. ».
Exos : Telecom Exos vient de déployer l’interface eRM-AFPR au SAMU57, pouvez-vous nous expliquer les enjeux pour le SAMU d’avoir cette nouvelle fonctionnalité directement dans votre logiciel de régulation médicale ?
Aude Jesupret : « Jusqu’à présent lorsqu’un appel au 15 nous permettait de déceler un potentiel arrêt cardiaque où le délai de prise en charge doit être extrêmement rapide, nous engagions les moyens pompiers et SMUR sur l’intervention. Sitôt réalisé cet engagement, nous consacrions de longues minutes à chercher une personne dans l’entourage de la victime afin de le guider dans la réalisation d’un massage cardiaque. Appels au voisinage, recherche de personnes valides et volontaires, sollicitation des proches avec tout ce qu’une telle situation comporte comme affect. Au final, beaucoup de temps perdu et quand on sait qu’une minute sans massage c’est 10% de chances de survie en moins, le projet répondait à une forte attente des services de secours.
Au-delà du temps, le projet permettait d’envisager des intervenants qualifiés, facilement joignables et surtout volontaires pour ce type de pratique, neutres dans leur relation à la victime et « détachés » émotionnellement de la situation. Autant d’atouts permettant d’améliorer la prise en charge du patient.
Frédéric LEYBOLD : « Notre enjeu de travailler avec le SAMU était de pouvoir bénéficier de l’expertise médicale qui vient en complément de l’engagement secouriste afin de pouvoir, par exemple annuler une intervention ou au contraire engagé un PR si l’arrêt cardiaque n’a pas été détecté avant. »
Les étudiants gagnent évidemment en autonomie puisqu’ils sont tout de suite dans la pratique active de leur futur métier. ».
Exos : Pouvez-vous nous en expliquer le fonctionnement ?
Aude Jesupret : « Concrètement lorsqu’on décèle un arrêt cardiaque, en même temps qu’on fait masser la personne par quelqu’un de l’entourage immédiat, on déclenche les secours. Dans l’interface de gestion de mission d’eRM, comme pour les moyens pompiers, les ambulances, on accède au moyens AFPR qui génère une demande AFPR en attente d’engagement.
La demande est envoyée aux personnes inscrites par l’AFPR comme 1er répondants sur le secteur. Tous les 1er répondants du département ne sont pas alertés mais seuls ceux se trouvant à proximité de la victime géolocalisée dans eRM. Ils sont géolocalisés (dans un rayon de 300m en milieu urbain et 500m en milieu rural). Ils reçoivent d’abord un appel téléphonique avec un message automatique les invitant à se connecter à l’application AFPR. Une fois connectés ils ont l’adresse d’intervention et les informations nécessaires. Lorsqu’ils acceptent la mission ils sont guidés via l’application.
Le choix intéressant fait par l’AFPR est de permettre à plusieurs 1er répondants de s’engager sur la même mission pour qu’ils puissent se relayer sur le massage, aller chercher un défibrillateur en se répartissant les tâches… Tout est fait pour optimiser les chances de survie.
De notre côté, nous avons l’acquittement de l’engagement des 1ers répondants ainsi que leur identité pour alimenter le dossier de régulation. Nous pouvons rassurer les personnes auprès de la victime pour les informer qu’une première aide arrive. Nous conservons la possibilité d’annuler à tout moment la mission en cas d’évolution de la situation. A la fin de l’intervention correspondant à l’arrivée des secours, les 1er répondants terminent leur mission sur l’application et le SAMU en est informé directement dans eRM. A posteriori, l’AFPR nous envoie un rapport d’intervention complet. »
Exos : De votre côté Monsieur LEYBOLD, comment êtes-vous organisé pour traiter la sollicitation du SAMU ?
Frédéric LEYBOLD : « De notre côté, concernant la mission du secouriste, il n’y a pas de régulation complémentaire à celle du SAMU. L’objectif est de ne pas perdre de temps : tout se fait de manière automatisée pour gagner chaque seconde. Et puis, de toutes façons, ce serait difficilement gérable.
Notre travail de « régulation » se fait en amont, auprès des personnes qui s’inscrivent. Nous vérifions leurs diplômes, l’actualisation de leurs formations…
La sélection des Premiers répondants se fait sur la base de leur formation. Si la formation n’est pas suffisante ou actualisée, nous les encourageons à se mettre à jour. Cela dit nous sommes pragmatiques et arbitrons chaque situation personnelle.
Concrètement, sur les territoires, nous proposons aux Présidents des Communautés De Communes de former des citoyens en travaillant avec les associations agréées de sécurité civile du département, sur le PSC ou recyclage PSC1. L’idée est de pas entrer dans une logique de concurrence mais de travailler en bonne intelligence. »
Au-delà du temps, le projet d’Exos permettait d’envisager des intervenants qualifiés, facilement joignables et surtout volontaires pour ce type de pratique, neutres dans leur relation à la victime et « détachés » émotionnellement de la situation. ».
Exos : Les applications de mobilisation de secouristes ou de personnes ressources en cas d’incident se sont développées ces dernières années, quelle est la plus-value du système de l’AFPR ?
Frédéric LEYBOLD : « Dans mon expérience professionnelle, j’ai eu la chance de travailler pour l’hôpital et pour les pompiers. Et, sur le terrain, il n’y a pas de blancs et de rouges mais des professionnels au service d’une victime. Dès le départ j’ai tenu à une interface commune, une interconnexion entre la rapidité d’engagement des moyens SDIS et l’expertise des moyens SAMU. L’une des spécificités de notre approche est de considérer la problématique de la victime plutôt que la nature des intervenants.
Ce qui va aussi différencier notre application c’est notre parti-pris, qui peut paraître plus fermé que d’autres solutions qui laissent la possibilité à tous citoyens d’entrer dans le système sans formation préalable. Enfin, nous sommes une association sans objectif de rentabilité et prônons une approche territoriale locale plutôt que nationale comme d’autres, où notre enjeu est d’abord de mailler un territoire avec ses acteurs, d’où nos actions avec les partenaires locaux des communautés de communes.
Aude Jesupret : « Je ne connais pas les autres applications mais le fait d’avoir l’assurance que les 1er répondants sont sélectionnés par l’AFPR sur la base d’un formation de secouriste ou d’une profession médicale ou paramédicale nous rassure nous, en tant que responsable d’une intervention sensible. »
Exos : Après ces premières semaines de collaboration directement via les applicatifs métiers, quel premier bilan en tirez-vous ? et quelles perspectives, idées ou projets entrevoyez-vous dans cette collaboration ?
Frédéric LEYBOLD : « Des idées oui, nous aimerions répondre au déclenchement de Premiers répondants sur d’autre pathologies que les arrêts cardiaques. On aimerait également que le SAMU ait un plus grande visibilité sur les déclenchements réalisée par le SDIS. Cela nécessite au préalable de dépasser les contraintes techniques. »
Aude Jesupret : « Nous sommes équipés depuis l’automne et ces premiers mois de recul nous permettent déjà de confirmer l’énorme intérêt du SAMU pour cette nouvelle fonctionnalité. Celle-ci est utilisée chaque jour, plusieurs fois par jour, sur chaque arrêt. Evidemment la réponse de 1er répondants n’est pas systématique car elle dépend du maillage des répondants sur le territoire mais l’AFPR travail avec les communes et les intercommunalités pour densifier ce maillage… avec succès.
Enfin, l’AFPR travaille sur le projet « géo-cœurs » : une centaine de défibrillateurs munis d’alarmes répartis sur des points stratégiques du département. Dès lors qu’un arrêt cardiaque est géolocalisé par le SAMU ou les pompiers, les défibrillateurs de la zone sonnent et via un QR-code indiquent la géolocalisation de l’incident permettant ainsi aux personnes les plus proches d’apporter le matériel. »
Exos : Pour terminer, Monsieur LEYBOLD, quels sont les prochains projets de déploiement avec Telecom Exos ?
Frédéric LEYBOLD : « Pour l’instant, rien d’officiel, nous avons des pistes sur d’autres SAMU mais l’idée c’est de travailler en bonne intelligence sur un territoire pour éviter de diviser les forces de secouristes locales. Et donc le travail préalable est d’approcher les territoires avant de réaliser et d’annoncer des déploiement.
Sur d’autres sujets nous travaillons sur le projet « géo-cœurs » évoqué par Madame Jesupret et nous allons lancer une plateforme de recensement de toutes les formations sur les territoires où nous sommes présents. L’objectif est, là encore, de renforcer notre logique d’intervention sur un territoire. »
Aude Jesupret : « En conclusion, c’est un vrai plus en régulation. On sait qu’on peut avoir, rapidement sur place, 1 personne neutre, qui connait les gestes au bénéfice de la survie du patient ! »